L'Atelier-Philosophie

de  la  maternelle  au  collège

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Je suis frappée par l'écoute mutuelle qui existe pendant de tels moments. Comment l'expliquez-vous ?

Et si un jour j'entends des propos discriminatoires , comment réagir ?

Comment éviter de porter des jugements de valeur sur ce qui se dit ?

Quelles sont les dérives qui peuvent se produire ?

Est-ce nécessaire d'avoir déjà instauré d'autres moments de parole dans la classe ?

Que faire pour l'enfant qui ne parle pas pendant l'Atelier-Philosophie ? et pour celui qui a tendance à parler en écho ?

Est-ce que cette pratique défavorise les enfants
" scolairement intelligents " qui ont besoin d'enrichir leur pensée rationnelle, et d'être guidés pour maîtriser l'argumentation ?


Que faire si les élèves n'ont pas fini de répondre à la question au bout des 10 mn ?

Je suis frappée par l'écoute mutuelle qui existe pendant de tels moments. Comment l'expliquez-vous ?

Dans ma classe de grande section, je suis étonnée que les enfants se tortillent, se balancent ou font toutes sortes de petits gestes. Est-ce normal ?

J'ai mis des albums genre " Ainsi va la vie " et les " Goûters philo " dans la bibliothèque de classe. Est-ce bien d'exploiter la question de l'Atelier-Philosophie avec ces ouvrages ?


Pourquoi le terme de philosophie, qui est peut-être abusif ici, et pas le terme de réflexion ? Pensée ou expression, de quoi s'agit-il vraiment ?


A terme, quels enfants formons-nous ainsi ?

 

 

 

 

Et si un jour j'entends des propos discriminatoires ou bien d'ordre privé , comment réagir ?

Cette réponse vous aidera à préparer votre séquence.

Votre appréhension est légitime, car effectivement toute discussion, toute rencontre est un risque.
D'autant que l'espace de la classe est un espace « public », et vous êtes responsable de la gouvernance éducative et pédagogique.
Un seul conseil : faites confiance au cadre.
- Le cadre proposé est conçu comme suffisamment bon pour qu 'advienne la pensée, et la parole authentique, dans le calme. Pour preuve le sérieux des échanges.
Le micro a pour fonction de réguler la parole en jouant le rôle du tiers (qu'est-ce qu'on va penser de ce que je dis ? ). Cette parole est enregistrée, on en garde la trace, disponible à tout moment enclasse. Les enfants s'efforceront de se montrer intelligents, pour les autres, pour le tiers (inconnu), et pour eux.
Mais il est vrai que certains, au début, peuvent être dans la provocation.
- Vous avez aussi posé comme principe éducatif la confiance inconditionnelle dans ce groupe de chercheurs, ce qui veut dire confiance dans les ressources humaines et intellectuelles de chacun. Si vous pensez que vous serez mal à l'aise, à cause de tel ou tel propos, forcément un enfant aura le même ressenti, et quelqu'un exprimera une réction à l'égard du provocateur ("tu n'as pas le droit de dire ça !" ; "explique toi, car je pense que tu as fait de la peine à xxx, et peut-être que tu ne le sais pas ...")
- Et enfin, ce temps de parole a lieu sur du temps scolaire, les règles de vie de la classe s 'y appliquent donc aussi, en particulier à propos du respect de l 'autre.
Où que cela se passe, l'injure raciste, sexiste ... est une enfreinte à la Loi, et l'enseignant a le devoir d'en faire le rappel.
- à tout momen, si le climat n'est plus propice à l'élaboration de la pensée, la séance peut être suspendue, puisque l'enseignant est le garant du cadre.
Il essaiera ensuite d'analyser, seul ou avec le groupe de suivi, pour apporter remède.

Pour parer aux confidences d'ordre privé, lors de la présentation de chaque séance, on peut dire quelque chose comme cela : "dans l'Atelier-Philosophie,tu ne dis que ce que tu veux bien dire au groupe."
Pour parer aux propos discriminatoires, on peut prévoir si besoin un dispositif (affichage, ....), qui rappelle les règles de vie de la classe (respect ...) au cas où. .Mais l'exprérience montre que rarissimes sont les transgressions. Quand cela arrive la réaction du groupe déconcerte le provocateur.

Changer son regard : premier point
Toute intervention est de fait une occasion donnée au groupe de se postionner, d'apprendre à réagir.
Y compris les propos dérangeants, tant par leur forme (manifestations émotionnelles, confidences d'ordre privé ...) ou par leur fond (propos partiaux, prosélythes, discriminatoires ...).
Les réactions se manifestent sur le mode de la pensée, dans le dialogue, justement au sein du groupe vécu comme solide,étayant, et non sur le mode de l 'affrontement physique interpersonnel. C'est un progrès !
Rien à voir avec le propos discriminatoire utilisé en cour de récréation (ou ailleurs), propos clandestin, blessant, ayant intention de faire une victime, et donc bien sûr répréhensible.
La dimension éducative l 'Atelier-Philosophie réside dans cette possibilité de transformation des modes de pensée, grâce aux interactions sociales.

Changer son regard : second point
Les émotions ont tout à fait leur place, dans l'Atelier-Philosophie. Elles constituent une étape obligée, celle des préalables à la pensée organisée.
Observez-vous : quel effet produit en vous une question importante ? Des émotions, des images, des souvenirs surgissent, inévitablement. Le corps en témoigne (on bafouille, on rougit, on se bloque ). C 'est pareil pour les enfants.
Pour Wallon , « Penser, c 'est interroger la pensée du corps ».
L 'Atelier-Philosophie n 'est pas un lieu thérapeutique, même si des émotions peuvent s 'y exprimer.
C 'est un espace de pensée universel, et on est fait ainsi, toute parole est travaillée d 'abord dans le corps de chacun.
Toute parole est travaillé dans le groupe, enrecherche de sens,
dans l 'exigence d'une rigueur commune.
Et si c 'est le lieu du particulier (et les émotions sont de l 'ordre du privé, de l 'intime), c 'est aussi, et à la fois, une scène de l 'universel, sur laquelle va se construire la singularité de chacun dans sa globalité, et où le particulier est aspiré à être dépassé.
Et les émotions, si elles mettent en mouvement (c'est l'étymologie du mot), dérangent aussi, c'est la vie, on ne peut faire cette économie qu'au prix du blocage de la pensée.
Se reporter aux étapes de la pensée de l'enfant.

 



Comment éviter les jugements de valeur ?

De qui à qui ou à quoi ?
Sur quoi ?

Toute question est intéressante.
Toute réponse authentique est intéressante.
Toute réponse est « provisoirement vraie ».
C 'est-à-dire qu 'on va pouvoir l 'examiner, la faire évoluer, la transformer parce que le groupe y a accès.
Le jugement de valeur est une des étapes dans la construction de la pensée.

L'Atelier-Philosophie pose que la confrontation régulière avec la pensée d'autrui, face à une énigme universelle, et l'expérience de la découverte d'être à la source de sa pensée, permet l'élaboration de la pensée personnelle, et la vivifie.
C'est une synergie, un processus d'évolution permanente.
Le processus est exactement le même chez l'enseignant, qui, au coeur de cette expériece, verra l'évolution de son regard sur les élèves (les étiquettes posées, par exemple : « Cet élève est limité ») ; mais aussi de ses pensées, tant sur le plan professionnel que personnel.

Pour les élèves, le « Je ne suis pas d 'accord avec ce que tu dis, parce que ...» déstabilise le jugement, tout en respectant la personne, et permet de construire au niveau des idées.
Prendre du recul, mettre de la distance, remettre en cause, cela s 'apprend dans le long terme, grâce à une rencontre familière régulière, bienveillante avec la pensée d 'autrui.
Elle se crée s 'il y a réellement circulation de pensées.
Grâce à la vertu de l 'étonnement.

Jugements de valeur sur les idées sont déboutés naturellement, ou pas ...
L 'étonnement surgit face à une réponse surprenante : «Pourquoi dis-tu ça ? » ; « C 'est vrai, ça, je n 'y avais pas pensé ! ». L 'un demande des précisions, l 'autre la justification de ce qui est avancé. L 'exercice de l 'argumentation arrive, de fait, par la nécessité à se faire comprendre, ou à comprendre l 'autre. Les points de vue s 'influencent, se transforment..
Cette envie de comprendre est le levier qui permet peu à peu de faire tomber les jugements, et de prendre du recul sur les a priori.


Quelles sont les dérives et les dysfonctionnements qui peuvent se produire ?

Cette pratique requiert la compréhension sensible et bienveillante de l'élaboratiobn d'une pensée collective qui se cherche, solidaire, universllle et particulière, avant d'être singulière.

Elle repose donc sur des valeurs humanistes.
Celles-ci doivent être partagées par l'enseignant.
Si ce n 'est pas le cas, des déviances pédagogiques dommageables pour les élèves peuvent vider de son sens l'activité.

Pour les enseignants qui vont porter le nom d ' "Atelier-Philosophie », ou d ' « Atelier-Philosophie-AGSAS » sur leur emploi du temps, les recommandations qui vont suivre sont à prendre en considération, le plus sérieusement possible.

- 1 La mise en oeuvre de l 'Atelier-Philosophie, implique pour l'enseignant une posture particulière, peu ordinaire, mais tout à fait possible à vivre si la pratique est un vrai choix, un engagement personnel.
Celle-ci est justifiée par les fondements théoriques, posés par les fondateurs en 1997 ; ils privilégient l 'émergence d 'une pensée authentique, critique et solidaire pour chacun, là où il en est. Le protocole proposé constitue les invariants de la pratique.
- 2 La marge de manoeuvre de l'enseignant concerne les variables ; c'est la part d'ajustement des conditions de la pratique à une classe réelle (effectif, niveau de classe, locaux, périodicité, matériel disponible ...). C'est le projet de l'enseignant, qui écrit sa séquence pédagogique, explicite,

Ceci dit, quelles sont les dérives possibles ?
Elles peuvent être dues à une interprétation erronée des textes, un projet pédagogique radicalement incompatible avec les fondements au niveau éthique, ou à une difficulté personnelle de l 'enseignant au niveau du savoir être.

Mise en garde et conseils
Cette pratique n 'est pas un enseignement, il n 'y a ni évaluation des élèves, ni programme. L 'enseignant doit accepter l 'idée que cette pratique facilite les apprentissages à condition qu 'il s 'efface, qu 'il fasse confiance, qu 'il ne juge pas. Ce ne sont pas les réponses qui comptent mais le cheminement de la pensée.

-1 La tentation la plus courante est d 'instrumentaliser l 'activité, c'est-à-dire d'en attendre un bénéfice précis, pour la classe, pour les élèves, pour soi, ... ; de la considérer comme une recette magique ; ou encore de confondre par ignorance de la théorie effets et objectifs.
Le but de l 'activité n 'est pas, de régler des problèmes de violence dans la classe. Si tel est votre objectif, d 'autres dispositifs, y compris philosophiques, sont plus adaptés.

- 2 Une autre tentation est de banaliser l 'Atelier-Philosophie. Ce ne sera jamais un moment de parole comme un autre, puisqu 'il convoque naturellement une parole authentique, singulière ; puisqu 'il engage largement et sereinement dans le « philosopher » (au sens de « cheminer avec la pensée »). Ce n 'est pas du scolaire habituel, c'est une médiation, même si on ne connaît pas bien ce mot dans la formation des enseignants.

- 3 La troisième tentation majeure peut se produire même quand l 'enseignant est de bonne foi, et concerne la mise en oeuvre dans la classe. En un mot c 'est l 'attitude d 'emprise sur la parole des enfants, que ce soit dans le fait d 'intervenir, de juger, d 'attendre des résultats, de récupérer, d 'exploiter ou d'enrichir ce qui est dit.
Un exemple courant : l'enseignant qui répète systématiquement ce que disent les élèves, pour amplifier le son. Du coup, ceux-ci se voient désapprorpriés de leur parole, se désintéressent des destinataires.
Les élèves ne s 'y tromperont pas. Si l'enseignant triche avec le protocole, récupère ce qu'il a entendu pour faire la classe (et sans y être autorisé), il y aura à nouveau les bonnes et les mauvaises réponses, il y aura à nouveau les jugements.
L'effet sera le silence chez ceux qui ne se sentiront pas à l 'aise pour parler librement, dans leur désir de croissance.
Il y a bien d'autres ressources dans la classe ...

Pour conclure, c 'est une pratique difficile pour beaucoup, ou du moins surprenante..
Mais le praticien débutant peut être aidé s'il le désire !
- ressources théoriques
- ressources humaines (groupe de discussion, suivi, lien avec des praticiens formés).
Ainsi, dans le troisième temps, les enseignants apportant leurs questions et leurs interrogations, par exemple : "pourquoi ai-je du mal à arrêter au bout des 10 min ? " , "j'ai commencé sans le magnétophone, je note, mais ça ne me satisfait pas. Comment faites-vous ?", "j'en ai assez des collègues qui se moquent et ne comprennet rien !" , "ça m'a donné l'idée de commencer autrement mes leçons, je leur demand ed'abord ce qu'ils savent sur le sujet, et alors, je suis parfois très étonné !" ...

Est-ce nécessaire d 'avoir déjà instauré d 'autres moments de parole dans la classe ?
Car je suis plutôt directive, et je ne leur laisse pas beaucoup l 'occasion de parler.

Non.
Il est nécessaire, par contre, d 'expliciter le sens et le déroulement de l 'Atelier-Philosophie, très soigneusement, et de parler du dispositif :
- durée, fréquence, nature, dispositif de recueil des questions des élèves, principe de non intervention du maître, de non évaluation, de respect des personnes ...
Vous respecterez ce cadre en toutes circonstances, vous en êtes le garant, vous êtes responsables de son bon fonctionnement..
Vous vous méfierez de vos réflexes pédagogiques, qui pourraient vous amener à vouloir contrôler le contenu et ne récupérerez aucune parole entendue ;vous ne jugerez pas.
La relation de confiance sera ainsi posée.
Elle est indispensable.

Mieux vaut un moment de parole bien mené, et intelligemment mis en oeuvre que des pratiques vidées de leur sens ("faire" à tout prix un "quoi de neuf ?" sans comprendre ce que cela signifie par exemple !)

Cette expérience de philosophie pour enfants est pour vous une chance de découvrir vos élèves sous un autre jour. Peut-être découvrirez vous par la suite la nécessité d 'autres moments de parole.
Réfléchissez à vos motivations profondes, à la position d 'emprise narcissique de l 'enseignant, au pouvoir qu 'il a dans la classe, notamment à travers la parole.Exercer l'autorité n'est pas en abuser...
Laissez-vous porter par les effets de la compréhension d'une pensée vive et authentique, celle qui est en train de se construire dans votre classe ...

 



Que faire pour l 'enfant qui ne parle pas pendant l 'Atelier-Philosophie ? et pour celui qui a tendance à parler en écho ?

Pour celui qui ne parle pas encore, rien.
S oyez patient.
Si l 'enfant ne parle pas, il écoute.
Il se peut qu 'il pense, vous ne pouvez être sûr de rien. Il est peut-être en train de prendre conscience de sa capacité à penser là, sous vos yeux. Un jour, il parlera et donnera sa pensée au groupe.

Dans un premier temps il parlera peut-être "en écho", répétant avec une petite variation ce qui vient d'être dit.
. C 'est normal.
Oser penser pour soi demande du temps.
Il a d 'abord besoin de s 'essayer, sans risque.
Il prendra peu à peu de l 'aisance et parlera en son nom.
Ayez confiance.


Cette pratique ne défavorise-t-elle pas les enfants « scolairement intelligents » qui auraient besoin d 'enrichir leur pensée rationnelle, et d 'être guidés pour maîtriser l 'argumentation ?

Ce dispositif stimule et nourrit tous les enfants, là où ils en sont.

TOUS les enfants.

L 'Atelier-Philosophie les incite à produire leur propre pensée, non à reproduire, à imiter le maître pour lui faire plaisir.
Les élèves, dès lors qu 'ils ont commencé à penser, construisent, étape par étape, et naturellement leur pensée, chacun à leur rythme.
Ces étapes ne sauraient être raccourcies, éludées.
Chez tous, dans la vie, l 'argumentation naît du désir de se faire comprendre.
L 'argumentation s 'élabore naturellement par la nécessité des interactions sociales, par le besoin de clarté.

Donc, dans un premier temps, pas besoin de guidage artificiel, , mené par un maître qui attend une réponse précise.
Ayant un statut égal, d'interlocuteurs valables, de chercheurs, les enfants apprennent spontanément les uns des autres, dans ce "club des penseurs". Par exemple, la trouvaille lexicale, la tournure nouvelle seront reprises spontanément.
En parallèle à ce phénomène d'apprentissage, l'"outil à penser" dès lors qu 'il a été repéré par l 'individu, est enrichi de toutes sortes d'expériences quand l'occasion et le besoin sont là.


Les "élèves qui réussissent à l 'Ecole" ont bien compris ce qu 'est le "métier d 'élève ". Ils savent décrypter les attentes du maître. Ce savoir peut représenter pour eux un handicap : ils auront pour certains à dépasser ce qui est de l 'ordre d 'une attitude réflexe: guetter la réaction du maître, attendre une gratification, apprendre par et pour l'adulte uniquement.
Ils auront à se prendre en charge ; à accepter d'apprendre des autres ; à donner leur part de pensée sincère dans le dialogue. Le dialogue aiguise l 'intelligence !
Mais la réussite scolaire, sanctionnée pardes diplômes, n 'a rien à voir avec l'élaboration d'une pensée singulière au sein d'un groupe coopérant, bienveillant, curieux, qui a envie de construire le monde de demain !
Ce qui veut dire qu 'avec leurs capacités d'abstraction, ces "bons élèves" pourront,là où ils en sont, et tout commechacun, apprendre à" penser pour de vrai", c 'est-à-dire pour eux, et contribuer à l 'effort du groupe.
Comme les autres ils en tireront des bénéfices, car les interactions sociales sont un levier puissant, même si on peut penser seul plus loin, dans un premeier temps.
De même pour les élèves en souffrance scolaire : chacun a à gagner, sur tous les plans.

On peut dire que l 'Atelier-Philosophie favorise tous les élèves, déjà favorisés ou non, puisque l 'évolution de chacun est relative à sa mesure personnelle, et vise la construction d'une pensée singulière.
L 'Atelier-Philosophie donne envie d 'être intelligent, de grandir, d 'être pris au sérieux, de parler en son nom.
La construction identitaire restera, de toute façon, un mystère hors de la portée de l 'enseignant, qui, en choisissant un tel dispositif, affirme son regard bienveillant et encourageant pour tous.

 

Que faire si les élèves n 'ont pas fini de répondre à la question au bout des 10 min ?

On arrête la cassette, car tel est le protocole !La durée de la séance fait partie des invariants.

Les enfants partiront frustrés chez eux, remplis du désir de comprendre encore, et se met en rout ele travail souterrain de la pensée, qui va courrir sur des mois, des années ...
Et l'Atelier-Philosophie a atteint son objectif !
A-t-on jamais fini de répondre à une question ?
D 'une séance à l 'autre, question après question, rebondissement après rebondissement, c 'est le chemin du questionnement qui s'affirme, se vivifie ...

Ce ne sont pas tant les réponses qui importent, que la vitalité de l 'Etre Humain, responsable de Sa vie, du sens qu'il lui donne, devant les énigmes universelles. Ainsi il pourra construire une pensée raisonnable, poutr lui et les autres.

 

 

 

Je suis frappée par l 'écoute mutuelle qui existe pendant de tels moments.
Comment l 'expliquez-vous ?

Voici des raisons, peut-être ni les seules, ni les bonnes .. !

1 C'un lieu de parole protégé. La communication est une communication de personnes à personnes, dans un groupe de pairs, tous chercheurs autour d'un même travail : l'objectif est clair.
Dans l 'Atelier-Philosophie, les enfants ont un cadre rassurant : ils peuvent penser et dialoguer tranquillement car ils ont le même statut.Le cadre fait qu'il ne peut y avoir abus de pouvoir:
Les échanges où on n 'a pas à rendre des comptes sont dans une logique de communication « pour de vrai », vivante, intéressante ; ils stimulent la motivation personnelle, l 'implication à écouter et à partager.
« je t 'écoute, tu m 'écoutes, nous échangeons, nous construisons ensemble ».

2 Cette communication nécessaire, fondamentale, est liée à la nature du moment de parole : sa visée est philosophique, touche l 'existentiel.
Ce qui est produit est de la parole authentique, profonde, engagée, respectée, respectable.
Chacun est dans l 'étonnement et la surprise de l 'autre, de ses pensées.
Chacun veut comprendre le monde. Les choses se disent, on ne sait pas à l 'avance. Il y a de l'étonnement et du suspens !

C 'est tout le contraire d 'un échange artificiel, comme c 'est le cas pour les jeux télévisés ou les exercices scolaires « habituels » lorsque la réponse est connue d 'avance.
Dans ces cas-là, l 'enjeu de l 'écoute est lié à la réussite « sociale » normée, au résultat attendu. L 'injonction d 'écouter casse l 'envie d 'apprendre, renvoie à la peur d 'apprendre.
Le plaisir de la recherche, de la découverte en commun est absent ; ne reste que la satisfaction à donner la bonne réponse.
C'est tout le contraire d'un échange convenu, où le discours est connu d'avance.

3 Dans ce cadre, chacun a sa place, humainement.
Dans l 'Atelier-Philosophie, les enfants ont un cadre rassurant : ils peuvent penser et dialoguer tranquillement, car chacun a sa place, chacun est respecté, chacun est quelqu 'un de bien.
Il n 'y aura pas d 'altercation, de prise à parti, de menace.
Toute l 'attention peut se porter sur l 'énigme du jour et sur ce qui se construit dans le groupe.
Quand on a envie de comprendre l 'autre, on a envie de se mettre à sa place, même si on ne sait pas quoi en penser d 'abord.
On va dissocier la personne de ce qu 'elle dit : « je t 'aime bien mais je ne suis pas d 'accord avec toi quand tu dis que & ».
On s 'essaye à la pensée des autres.
Cette écoute attentive engendre ainsi un processus d 'humanisation : « écouter les autres, ça m 'apprend comment c 'est la vie ».

4 Le travail interne de l 'écoute
Cette écoute mutuelle attentive est le reflet d 'un travail complexe de la pensée : comprendre, entendre, (s ') écouter, se concentrer, mémoriser, différer sa prise de parole, trier les informations, trier ses idées, choisir.
C 'est ce qui se passe effectivement en chacun.
Elle oblige à une ouverture d 'esprit considérable, et à un sacrifice narcissiuqe non moins important ....
Un témoignage d 'enfant de cycle 3 après une séance : « je n 'ai pas parlé, parce que x a dit mon idée, il l 'a très bien dite, alors je ne voulais pas la répéter, on n'a que 10 minutes! ».
L 'écoute mutuelle développe une rigueur de pensée, crée un climat de sérieux et de gravité.

Pour conclure,il semble qu 'aujourd 'hui, les enfants n 'ont pas tant besoin de parler, que d 'être écoutés attentivement, avec sérieux.
Ils ont besoin de présences réelles, « écoutantes », celle de leurs pairs, celle des autres. A ce point de vue ce groupe de co-chercheurs est cadeau pour tous.


Dans ma classe de grande section, je suis étonnée que les enfants se tortillent, se balancent ou font toutes sortes de petits gestes. Ils semblent peu concentrés.
Est-ce normal ?

Oui, ce n 'est pas preuve d'ennui !
C'est tout le contraire, l'attention des enfants est focalisée sur la question, et le corps en enregistre les effets.
C' est le travail de la pensée qui agit dans le corps.
Regardez sans juger.
Pour Wallon, « penser c 'est interroger la pensée du corps ».
Quel effet cette question produit-elle sur moi ?
De la gêne ? un malaise ? un assaut de souvenirs plaisants ?

Enfant ou adulte, le corps est labouré par les émotions qui le submergent.
Les émotions feront place, peu à peu, peut-être à des images, à des mots, qui en s 'organisant, permettront l 'élaboration d 'une idée ... avec du temps, beaucoup de temps avant que ne soit structurée la pensée rationnelle !
Laissez faire.
Ces manifestations physiques incontrôlées sont la trace d'une pensée qui se cherche dans le corps.
C'est pa première étape des préalables à la pensée philosophique, qui caractérisent notre courant de philosophie pour enfants.

Consultez l'article de Jacques Lévine sur les étapes de l'élaboration de la pensée chez l'enfant.


J 'ai mis des albums « Ainsi va la vie » et les « Goûters philo » dans la bibliothèque de classe.
Est-ce bien d 'exploiter la question de l 'Atelier-Philosophie avec ces ouvrages ?

Les documents de la bibliothèque sont en libre service.
Tout ouvrage, étiqueté philosophique ou non, peut révéler à l 'enfant son propre questionnement, s 'il a une question qui le préoccupe.
Mais ces collections ne garantissent pas que les enfants pensent !!! L'accompagnement d'un adulte, parent ou enseignant est nécessaire.

L'Atelier-Philosophie donne à tous l'habitude à penser tranquillement, sa vie, la vie, le monde de demain.
Cette habitude est liée au désir de comprendre, de grandir, à la curiosité, à l'étonnement.
Cette habitude jubilatoire repose sur une expérience intime et unique : la prise de conscience qu'on est à la source de sa pensée. Cette exprérience peut survenir n'importe quand, mais il y a des conditions qui la favorisent.
La curiosité éveillée, l'enfant aura plaisir à lire sur la question qu l'intéresse, si lire est pour lui un plaisir, à la bibliothèque et ailleurs.

Mais c 'est leur démarche de recherche qui compte, pas votre travail.
Il n 'est donc pas question d 'exploiter, de faire le tour de la question, ni pendant les temps 1 et 2 du protocole, ni après.
Il n 'est pas non plus question de récupérer ce que vous entendez pour l 'exploiter.
C'est à l'enfant à faire des liens, pas à vous, et dans la mesure où la philosophie n'est pas un enseignement, vous n'avez pas à fair ele tour de notions philosophiques. ; c'est juste une médiation, mais quelle médiation !!!
Si un enfant propose donc de présenter un livre très bien, qui pour lui pose une question philosophique, c'est formadable.
Laissez-lui se rendre compte qu 'il est intelligent !

La pensée pourra alors circuler.

Nota bene : beaucoup d'albums, d'ouvrages de littérature jeunesse, beaucoup de contes, de poésies, sont porteurs de questionnements d'ordre philosphique ...Ils ne sont pas pour autant à décortiquer !

 



A terme, quels enfants formons-nous ainsi ?

Ni des philosophes, ni des experts de la pensée ; juste des gens qui auront envie de "bien vivre", portés par un élan de civilisation, d'humanité, dans un monde dont ils se sentiront responsables.
L'enseignant doit avoir en tête, en permanence, la question suivante : comment aider tous les enfants de sa classe à penser tranquillement la vie-leur vie, ensemble et "pour de vrai", par eux-mêmes ?

 

Pourquoi le terme de philosophie, qui est peut-être abusif ici, et pas le terme de réflexion ? Pensée ou expression, de quoi s'agit-il vraiment ?

Ne banalisons pas l 'activité !

L 'Atelier-Philosphie revendique une visée philosophique.
Son intention est philosophique, et concerne les interrogations sur le « bien vivre ».

Le dispositif prend en compte les questions mêmes des enfants, le moment de découverte de du « cogito », valorise le dialogue entre co-chercheurs, et renforce le sentiment d 'appartenance à l 'humanité en construction.
La pratique donne accès à une vision globale du monde pour tous les enfants.
Elle permet à chacun, à son rythme, de dépasser ses particularités, pour construire sa singularité, grâce à la rencontre de l 'universel : les énigmes de la vie.
Evoquons ici le « bien vivre » d 'Aristote qui prône l 'étonnement et le doute comme vertus de la philosophie.
Evoquons ici les courants de la philosophie humaniste, de la philosophie de la reconnaissance ...

L'objectif dépasse largement la struturation de l'appareil à penser. Il englobe l'Etre dans sa totalité.
P ar ailleurs, les recherches de Jacques Lévine sur le processus de penser des enfants mettent en évidence des étapes jusqu 'ici inconnues, qui constituent les préalables à la pensée philosophique.
Ce courant des préalables à la pensée philosophique est fondé sur l 'expérience d 'être à la source de sa pensée, et non sur l 'exercice de l 'appareil à penser, ou l 'entraînement à la réflexion.



 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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